Loi Alur. « Volontariste », Cécile Duflot répond déjà aux critiques


  le 10 Septembre 2013

Pour l’introduction du débat sur son projet de loi pour l’Accès au logement et l’urbanisme rénové, mardi après-midi, à l’Assemblée nationale, Cécile Duflot a multiplié les marqueurs de gauche.
La manière dont la puissance publique répond à la crise du logement « détermine une part de l'avenir d'un pays », a expliqué, solennelle, la ministre du Logement. Dans un contexte de crise économique, poursuit l’écologiste, la violence de la « fracture résidentielle est telle que beaucoup ont la sensation que le progrès social en berne se double pour eux d’une assignation à résidence ». Avant d’être une possibilité de rendement, un placement, le logement est « tout simplement un bien de première nécessité », un  point de départ qui « détermine nos conditions d’existence, leur réussite éducative, leur santé, leur insertion professionnelle ». Or, les locataires sont les « grands perdants d’une décennie de laisser-faire et de flambée des prix » au point qu’un sur cinq « dépense plus de 40% de ses revenus pour se loger ». Face à une telle situation, Cécile Duflot en est convaincue : « l’Etat peut agir», notamment avec « une approche globale qui ne cède rien aux modes libérales et aux effets dévastateurs de l’illusion dérégulatrice ».
Une « philosophie de progrès social » revigorante dans cet hémicycle, habitué ces derniers mois aux mesures d’austérité ou aux reculs tels que l’ANI. Mais Cécile Duflot sait bien que ce discours offensif ne la prémunira pas contre les critiques, qui ne sont pas seulement portées par la droite et la puissante Fédération nationale des agents immobiliers (FNAIM). Le DAL, la CNL, la Fondation Abbé-Pierre ont tous regretté un encadrement des loyers qui fera uniquement baisser les loyers les plus chers, oubliant les plus modestes. Une critique relayée par André Chassaigne, à la tête du groupe Front de Gauche pour qui ce texte, s’il « va dans le bon sens », doit être renforcé car « il peut engendrer des effets pervers ». Le député PCF du Puy-de-Dôme a aussi pointé avant l’examen du texte des « insuffisances sur les expulsions locatives ».  
Encadrement des loyers
Si la ministre a ouvert la porte à un renforcement de son texte sur la prévention des expulsions, elle juge équilibré son dispositif d’encadrement des loyers. Elle a renvoyé, dès son discours introductif, les critiques venant de droite comme de gauche.
Les lobbys dénoncent un dispositif qui découragerait l’investissement locatif et toucherait au portefeuille les petits propriétaires ? « Comme si les décisions des investisseurs sérieux reposaient sur les possibilités d’excès qu’autorise le marché ! » rétorque la ministre, qui rappelle que les propriétaires-bailleurs ne sont pas les plus à plaindre. Ils possèdent « un patrimoine moyen plus de trois fois supérieur à celui de l’ensemble des ménages » et « deux tiers des logements locatifs privés appartiennent à des propriétaires dont le niveau de vie est supérieur à celui de 80% de la population.»
Les associations craignent un encadrement pour les locataires les plus riches ? «C’est faux, tranche Mme Duflot. Les personnes modestes payent en moyenne des loyers au m2 plus élevés que le reste des ménages car elles se logent dans des logements de plus petite superficie. Les personnes aisées sont également dans leur grande majorité propriétaires de leur résidence principale et non locataires.»
Mais elle a surtout insisté, au perchoir, sur la Garantie universelle pour le logement. Signe que les discussions les plus animées porteront sur cette mesure destinée à protéger propriétaires et locataires contre les impayés de loyers. Ce premier pas vers « la sécurité sociale du logement » a d’ailleurs été la la plus attaquée, mardi, à l’ouverture des débats. En particulier par l’ancien ministre du Logement, Benoist Apparu, qui a immédiatement demandé un renvoi du texte. « 97% des locataires payent leur loyers mais vont subir une taxe, 97% des propriétaires reçoivent leur loyers mais vont subir une taxe », a lancé le député UMP de la Marne, tout en soulignant que les impayés ne concernaient que 3% des loyers. Pour Christian Jacob, président du groupe UMP, il s’agit tout simplement d’une « mesure collectiviste qui va donner un sentiment d'impunité aux mauvais payeurs ».
La Garantie universelle pour le logement (GUL), est aussi contesté sur les bancs socialistes. Si certains veulent juste en changer le nom, d’autres, comme Christophe Caresche, député de Paris, craignent «une hausse incontrôlée du prélèvement sur les propriétaires et locataires». La GUL sera un échec, comme la Garantie des risques locatifs (GRL) mise en place par Jean-Louis Borloo, a aussi prédit Benoist Apparu. « La GRL n’a pas fonctionné parce qu'elle n'était pas universelle », a immédiatement rétorqué la ministre Duflot, sans attendre l’ouverture de la discussion générale sur le texte. Annonçant une rude bataille dans les travées de l’Assemblée nationale ces prochains jours…
Pierre Duquesne

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