L'encadrement et la garantie universelle des loyers adoptés à l'Assemblée


Le Monde.fr avec AFP | 12.09.2013

L'Assemblée nationale poursuivait, jeudi 12 septembre, l'examen du projet de loi Duflot sur l'accès au logement. Après le très controversé dispositif sur l'encadrement des loyers, un contrôle accru des locations de meublés de tourisme a été adopté. Dans la foulée, un autre point-clé de la loi a été voté, celui de la garantie universelle des loyers. D'ici à vendredi, les 84 articles du texte devront avoir été examinés, avant le vote solennel à l'Assemblée nationale prévu mardi 17 septembre.

Lire : "Les points clés de la nouvelle loi sur le logement"

 La garantie universelle des loyers adoptée
La "garantie universelle des loyers" (GUL), adoptée jeudi à l'Assemblée nationale, permettrait aux propriétaires de continuer à percevoir des loyers en cas d'impayés. Si le taux de loyers impayés en France (2 %) est faible, ce risque inquiète certains propriétaires, qui préfèrent alors garder leurs logements vides plutôt que risquer d'être confrontés à un mauvais payeur – et aux longues et lourdes procédures pour l'expulser.
Ce dispositif obligatoire de garantie universelle des loyers, qui devrait rentrer en vigueur au plus tard en 2016, sera alimenté par un prélèvement de 2 % environ du loyer, payé à parts égales par le propriétaire et le locataire. Un établissement public sera chargé de percevoir cette taxe et de rembourser les propriétaires dont les locataires sont défaillants.
La location de meublés de tourisme davantage encadré
Dans le sillage de préoccupations exprimées par plusieurs députés socialistes, notamment franciliens, face au développement de plateformes Internet de location de meublés de tourisme, telles que Airbnb, Cécile Duflot a affiché la volonté d'"encadrer la situation existante – pas satisfaisante–, et de responsabiliser les intermédiaires qui profitent du développement de ce marché".
Tout intermédiaire rémunéré – notamment par la mise à disposition d'une plateforme numérique pour la mise en location d'un meublé de tourisme – devra informer le loueur des obligations légales de déclaration ou d'autorisation préalables et obtenir de ce dernier, avant la location du bien, une déclaration sur l'honneur attestant du respect de ces obligations, en vertu d'un amendement gouvernemental voté jeudi.
"Par souci de simplification administrative et de clarification du droit", le gouvernement a fait adopter un autre amendement précisant que la déclaration préalable de location d'un meublé de tourisme n'est pas obligatoire lorsqu'il s'agit de la résidence principale du loueur, c'est-à-dire qu'il l'occupe au moins huit mois par an. Dans un tel cas, ces locations relèvent davantage d'"un complément de revenu", a notamment estimé Mme Duflot.
Lire : "Paris s'inquiète de la multiplication des locations saisonnières"

L'encadrement des loyers voté au grand dam de la droite
L'article 3 du projet de loi sur l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), adopté en première lecture, est l'une des mesures phare du projet de loi Duflot sur l'accès au logement. Il  prévoit que dans les zones "tendues", marquées par un fort déséquilibre entre offre et demande de logements, les loyers ne pourront excéder de plus de 20 % un "loyer médian".

A gauche, socialistes et écologistes ont voté pour, tandis que les communistes se sont abstenus, considérant que la mesure "ne va pas assez loin" et peut entraîner des "effets pervers", comme l'augmentation de bas loyers. La droite a rejeté l'article, "un très mauvais remède à un vrai problème", l'inflation des loyers, selon la formule de l'UDI Michel Piron. "Vous allez encore aggraver la pénurie de logements" en dissuadant les investisseurs de louer et construire, a aussi lancé l'ex-ministre UMP délégué au logement, Benoist Apparu.


Défendant une "mesure politique" de "régulation", la ministre du logement, Cécile Duflot, a rétorqué : "Nous allons bloquer le thermomètre ? Non, nous allons bloquer la fièvre." A l'appui de son plaidoyer, la ministre écologiste a invoqué d'anciens propos favorables à l'encadrement des loyers de l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy et... de Benoist Apparu lui-même.


Loi logement : l'UMP dénonce un "discrédit" jeté sur les propriétaires
Le Monde.fr | 12.09.2013
Par Catherine Rollot

A peine deux articles sur 84 examinés après deux jours de séance publique. Jeudi 12 septembre, à une heure du matin, après s'être éternisé en raison d'une multitude d'amendements sur les premiers articles, les députés n'avaient toujours pas commencé à décortiquer le dispositif d'encadrement des loyers, une des mesures les plus clivantes du projet de loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové (ALUR).

Dans un hémicycle très clairsemé, les parlementaires UMP, David Douillet (Yvelines), Gilles Lurton (Ille-et-Vilaine) et Véronique Louwagie (Orne) ont juste eu le temps de plaider contre la mesure inscrite à l'article 3 du texte avant la levée de la séance de nuit. "Cet article comme le projet de loi tout entier jette le discrédit sur les propriétaires", a lancé M. Douillet.

Ses collègues ont préféré insister sur "les effets contre-productifs d'une mesure" qui entraînerait, selon eux, une hausse des loyers pour les locataires les plus modestes et une baisse pour les ménages les plus aisés. Cet argument est servi depuis hier par nombre de députés hostiles au texte de Mme Duflot, la ministre du logement. Ils s'appuient sur les travaux du professeur d'économie Michel Mouillart (Université Paris Ouest), par ailleurs directeur scientifique de l'observatoire des loyers Clameur, un observatoire privé qui collecte les données provenant de professionnels de l'immobilier. Selon les simulations de M. Mouillart, le mécanisme de baisse croîtrait avec le montant des loyers.

DES DÉBATS SUR LE BAIL ET L'ÉTAT DES LIEUX

Dès le début de la polémique, mardi 10 septembre, Cécile Duflot s'était défendue à l'Assemblée nationale, faisant valoir que "les personnes modestes payent en moyenne des loyers au m2 plus élevés que le reste des ménages car elles se logent dans des logements de plus petites superficies. Les personnes aisées sont également, dans leur grande majorité, propriétaires de leur résidence principale et non locataires", avait-elle ajouté.

Les débats de mardi ont essentiellement porté sur l'établissement d'un bail et d'un état des lieux type, qui sera défini par décret en Conseil d'Etat. Pour "assurer des relations justes et équilibrées entre les bailleurs et locataires", un amendement du rapporteur du projet de loi, Daniel Goldberg (PS-Seine-Saint-Denis) a été adopté. Il précise que les contrats de locations pourront comporter une clause prévoyant des pénalités pour retard de paiement des loyers et des charges. Par ailleurs, plusieurs amendements socialistes et écologistes ont été votés pour encadrer davantage les ventes d'immeuble à la découpe. D'ici vendredi 13 septembre, tous les articles du texte devront avoir été examinés, avant le vote solennel à l'Assemblée nationale prévu mardi 17 septembre.

L'encadrement des loyers avantage les locataires les plus aisés
Le Monde.fr | 11.09.2013
Par Jérôme Porier

L'encadrement des loyers avantage les locataires les plus aisés. Mis en place depuis le 1er août 2012, l'encadrement des loyers décidé par le gouvernement est-il efficace ? Clameur, l'observatoire interprofessionnel des loyers, s'est penché sur le sujet dans sa dernière étude trimestrielle, dévoilée mardi 10 septembre.
Ses conclusions ne vont probablement pas faire plaisir à la ministre du logement, Cécile Duflot. "Ce dispositif n'a pas eu l'effet escompté, écrit Michel Mouillart, professeur d'économie à l'université Paris-Ouest. Que les agglomérations aient été ou non concernées par le décret, partout les loyers ont progressé (entre deux locataires) à un rythme comparable à celui observé en 2012."

16 % DE BAISSE À PARIS

Que dit exactement le texte ? Dans certaines zones tendues dotées d'un observatoire des loyers, le nouveau loyer ne peut excéder un "loyer médian de référence majoré" tenant compte des caractéristiques du logement. Selon les simulations de Clameur, à Paris, où la médiane des loyers (tous types de biens confondus) ressort à 23,30 euros le mètre carré, 23 % des loyers devraient être ajustés à la baisse car ils sont supérieurs de plus de 20 % à la médiane. En moyenne, la diminution de loyer devrait atteindre 16 %, et jusqu'à 32 % pour les 5 % des loyers les plus élevés.

Conclusion : l'encadrement des loyers est efficace pour faire baisser les loyers les plus élevés. D'où l'idée que ce dispositif favoriserait les locataires les plus aisés. "A priori, ce ne sont pas les ménages les plus modestes qui habitent les logements les plus chers !", glisse M. Mouillart. De même, à Lyon, les 5 % de loyers les plus élevés du marché baisseraient de 43 %.

Reste que Clameur n'a pas analysé l'impact du dispositif sur les microsurfaces (chambres de bonne, etc.) louées à des prix prohibitifs, alors que ce sont les nombreux excès constatés sur ce marché, en particulier à Paris, qui avaient poussé le gouvernement à légiférer.

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