Les « découpés » de Jemmapes pourront rester chez eux

 Promesse tenue ! Les habitants des 166-172 quai de Jemmapes (Xe) pourront rester chez eux. Le groupe Gecina, propriétaire des lieux, avait décidé de vendre les 139 logements à une filière foncière du groupe BNP qui s'était empressée de les revendre à la découpe, lot par lot.
47 foyers parisiens se trouvaient ainsi menacés de quitter les lieux. La maire (PS) de Paris Anne Hidalgo et son adjoint (PC) chargé du logement Ian Brossat s'étaient engagés à racheter leurs logements via une filiale du bailleur social Paris Habitat. Une délibération entérinant le processus a été adoptée hier par le Conseil de Paris.
27 mai 2015, le Parisien

Fin et victoire d'une longue lutte des locataires !


La colère des « découpés » s'affiche sur le canal
Au canal Saint-Martin, une résidence se mobilise

Le Parisien | 25 mars 2013

Les panneaux barrés de slogans ont été accrochés à la plupart des fenêtres qui dominent le canal Saint-Martin. Depuis hier, l'inquiétude et la colère des locataires menacés par un projet de vente à la découpe (la cession appartement par appartement d'un bâtiment détenu par un bailleur unique) s'affichent sur un nouvel immeuble : la résidence du 166-172, quai de Jemmapes dans le Xe dont les occupants (environ 130 familles) ont organisé hier un rassemblement pour s'opposer à ce qu'ils nomment une « vente forcée ».

Construite au début des années 1980, la résidence fait partie du patrimoine (une dizaine d'adresses représentant plus de 1200 logements) que le géant de l'investissement immobilier Gécina avait cédé au groupe BNP Paribas, au printemps 2012. Le nouveau bailleur a lancé la procédure de vente par lots dans la foulée.

Les locataires concernés — ils préfèrent se qualifier de « découpés » — bénéficient d'après la loi d'un droit prioritaire pour racheter le logement qu'ils occupent. « Mais à quel prix? » s'inquiètent les habitants du quai de Jemmapes. Selon leur comité, Gécina aurait vendu le bâtiment il y a un an au tarif, très attractif, de 5500 € le m2. Un prix de « gros » pour un immeuble occupé. Les tarifs demandés par le propriétaire, et vraisemblablement annoncés aux habitants dans un mois, seront sans nul doute bien plus élevés. La filiale de la BNP Paribas (une SNC domiciliée… dans la loge du 166, quai de Jemmapes) n'a pu être jointe pour le confirmer.

5 000 logements seraient concernés chaque année

« La majorité des occupants n'auront pas les moyens d'acheter. Malgré la prétendue protection de la loi Aurillac de 2006 (NDLR : la prolongation du bail des locataires ne souhaitant pas acheter étant pour un maximum de 6 ans), ils seront tous condamnés à déménager », pronostique Benoit Filippi, animateur de la « plate-forme des locataires découpés » qui regroupe une dizaine de collectifs de locataires concernés par le phénomène. Cette plate-forme ainsi que le comité des locataires du quai de Jemmapes réclament l'intervention de la Ville pour faire racheter la résidence et la maintenir dans le secteur locatif. Cette solution a été utilisée, avec succès, il y a un an pour « sauver » une résidence locative de 200 logements dans la rue Pradier (XIXe) que Gécina souhaitait déjà vendre par lots. Après des mois de mobilisations des habitants, l'office HLM de la ville, Paris Habitat, avait fini par racheter l'ensemble… pour 74 M€.

Mais l'opération avait consommé en une fois la quasi-totalité du compte foncier annuelle de la mairie et ne pourra pas être répétée plusieurs fois. « Il faut renforcer la loi pour interdire les congés-ventes spéculatifs qui contribuent au départ des classes moyennes de la capitale », insiste René Dutrey, président (EELV) de la commission municipale du logement, qui est venu hier apporter son soutien quai de Jemmapes. Selon les spécialistes, chaque année plus de 5000 logements sont vendus à la découpe dans la capitale.


La pression monte contre la vente à la découpe
PIERRE DUQUESNE LUNDI 14 MAI 2012
L'HUMANITÉ
Ce matin, au Conseil de Paris, les locataires du 25, rue Pradier (19e), et du 166, quai 
de Jemmapes (10e), peuvent gagner une première bataille contre les spéculateurs.
«On ne nous découpera pas ! » criaient, le 17 avril, les locataires des 25-31, rue Pradier et 166-172, quai de Jemmapes, en manifestant devant la Bourse de Paris. Ce matin, c’est devant l’Hôtel de Ville qu’ils continuent d’accentuer la pression contre les spéculateurs. Leur lutte contre la société Gecina, qui a vendu leurs logements par lots ou à la découpe pour tirer un maximum de profit de la bulle immobilière parisienne, est devenue une véritable bataille politique.

Leur mobilisation est en passe de faire bouger les lignes de l’exécutif parisien, bien aidés en cela par les élus du Front de gauche de la capitale. Un vœu, présenté aujourd’hui par la majorité devant le Conseil de Paris, demande à Gecina et la BNP de « renoncer à leur projet », et prévoit la possibilité de « rachat en tout ou partie des logements non acquis par les locataires, soit par des organismes HLM, soit par des investisseurs à long terme ».

Une avancée à laquelle Alain Lhostis, élu PCF dans le 10e arrondissement de Paris, a fortement contribué en relayant, dans son conseil d’arrondissement, la demande de préemption par 107 des 139 des locataires du 166, quai Jemmapes. Il regrette cependant que cette évolution intervienne si tardivement. « Si nous avions utilisé la préemption dès le début de la procédure, comme je l’avais alors demandé, nous aurions pu acheter moins cher et renforcer notre position dans la négociation avec Gecina. Mais les élus socialistes avaient refusé parce qu’il n’y avait pas de moyens. »

Quel que soit le résultat du vote, les locataires ne baisseront pas la garde. Le texte, qui envisage le rachat des logements « en fonction de la situation sociale des locataires » ne concerne que deux immeubles parisiens. « Rue Taine dans le 12e arrondissement, à Barbès, rue Vauvenargues (18e), des dizaines d’autres immeubles sont menacés », explique Alex Maudet, de la confédération nationale du logement qui, avec son puissant réseau d’amicales de locataires, ne cesse de détecter des risques de vente à la découpe. « En cet après 6-mai, il faut faire monter la pression pour que les futurs parlementaires, en plus d’une baisse des loyers par décret, réglementent plus strictement la vente à la découpe. On pourrait soumettre les mises en copropriéte des immeubles à une autorisation de la municipalité, comme cela se pratique à Philadelphie ou Chicago. Ainsi, un immeuble vendu en bloc pourrait être maintenu à usage locatif. »

Il faudrait également un dispositif « contre les acquéreurs en bloc d’un immeuble qui le dégradent délibérément afin d’en faire partir les locataires », ajoute aussi Brigitte Ferrand, qui bataille avec ses voisins contre un « bailleur brigand » dans le 18e arrondissement. Le maintien du rapport de forces permettrait, selon Ian Brossat, à la tête du groupe communiste et des élus du parti de gauche au Conseil de Paris, « d’appuyer notre demande d’augmenter le compte foncier du budget de la Ville de Paris ». Ce n’est qu’à ce prix que l’on pourra augmenter le nombre de logements sociaux dans l’ensemble des arrondissements et maintenir « une véritable mixité sociale dans la capitale ».

Un atelier anti-spéculation

Un premier atelier législatif du Front de gauche organisé par l’Association nationale des élus communistes et républicains s’est tenu samedi à Lille. Une soixantaine d’élus, de représentants d’associations de locataires, de militants du PCF et du PG ont élaboré des propositions pour « une législature pour une vraie politique du logement ». La table ronde sur la lutte contre la spéculation immobilière et foncière a été la plus prolifique avec, notamment, une proposition très détaillée de taxe sur les transactions immobilières dans le privé. La nécessité de mener le combat pour le droit à la ville au niveau européen a aussi été rappelée avec force par Barbara Steenbergen, une représentante allemande de l’Association internationale des locataires (IUT), et de nombreux intervenants issus du monde HLM.

Faire sa demande de logement HLM en ligne

Depuis lundi, toute demande de logement social peut se faire sur un site Internet gouvernemental spécifique. 
Le portail demande-logement-social.gouv.fr qui, depuis un an, permettait de renouveler en ligne sa demande de logement HLM, accueille aussi les dépôts de dossiers. 
De fait, il n'est plus nécessaire de se déplacer au guichet pour faire sa première demande de logement social, "même si cela reste possible", précise le ministère. 

Prévue par la loi ALUR du 24 mars 2014 portée par l'ex-ministre du logement Cécile Duflot, cette mesure vise en effet à simplifier les démarches du demandeur de logement, mais aussi à permettre aux bailleurs sociaux de partager leurs informations. 

Le site donne accès à des informations sur le parc social de chaque commune : nombre de demandes en attente ou de logements attribués l'année précédente par type de logement. Un numéro d'assistance téléphonique, le 0812 04 01 70, est mis en place pour accompagner les utilisateurs. 

En France, 1,7 million de personnes sont en attente d'un logement social (dont 500 000 vivent en HLM mais souhaitent changer de logement). 
A Paris, l'attente est en moyenne de six ans pour un F1, de neuf ans pour un F2 ou F3 et de dix ans pour un F4, selon la Drihl, dont les chiffres datent de 2013.

http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/F10007.xhtml#N10092



Mille logements à la place du parc des sports de Choisy ?

F.D. | 09 Avril 2015 le Parisien 
Choisy-le-Roi, hier. Acheté en 1932 par le conseil général de la Seine,
le terrain était une vaste décharge. Aujourd’hui, ce sont des milliers
 de personnes qui fréquentent ce parc chaque week-end. (LP/F.D.)
 
  Véritable poumon vert, le parc des sports est l'un des sites repéré par l'Etat pour y accueillir des logements. Un projet qui suscite l'incompréhension des élus et des sportifs qui fréquentent ce parc.
Le terrain du parc interdépartemental des sports de Choisy va-t-il devoir accueillir, à l'horizon 2030, plus de 1 000 logements ? Ses 150 ha font en tout cas partie des sites « à l'étude » identifiés par l'Etat dans le cadre du plan de mobilisation pour le logement (notre édition d'hier).
A Créteil, le maire (PS) Laurent Cathala ayant confirmé la création de 2 200 logements autour de la future gare du Grand Paris à l'Echat, les 1 300 logements restants -- pour atteindre 3 500, soit le « potentiel de logements estimé » sur l'ensemble de la zone -- reviendraient donc... au parc de Choisy.

« Je suis très étonné de ce choix, explique le maire PCF de Choisy, Didier Guillaume. Cela confirme le fait que ce sont des décisions prises par des technocrates qui ne connaissent pas la réalité du terrain. » Ce parc « est un poumon vert, poursuit-il. Beaucoup de clubs y viennent ». Et d'assurer qu'il mènera « bataille, si un jour, le projet se concrétise ».

Hier, le simple fait d'évoquer ce projet avec un groupe de sportifs suscitait l'incompréhension. « Le problème, c'est qu'il y a énormément de clubs qui utilisent les parcs de Choisy et du Tremblay (NDLR : à Champigny) car ils y sont envoyés par les villes n'ayant pas d'équipements », avance Farid Bensikhaled, responsable du comité de la FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail) du Val-de-Marne, qui pointe une vraie « pénurie » d'installations sportives. Sur les 150 équipes de football à 7 de la fédération, « 70 % jouent à Choisy. Et je ne parle que du foot à 7 », précise-t-il.

« On ne comprend pas, avance Nathalie Dinner, présidente du parc et conseillère départementale (FG). Du logement, oui, mais il y a d'autres lieux. » Que le parc soit envisagé comme un site « potentiel » fait également hurler Hélène Luc, sénatrice et conseillère générale honoraire, présidente du parc pendant plus de trente ans. Le terrain, à l'époque une « vaste décharge, a été acheté en 1932 par le conseil général de la Seine, rappelle-t-elle. En 1967, il a pris des garanties pour que les espaces verts restent des espaces verts. Il faut du logement. Mais amener aujourd'hui des gens sur ce terrain qui ne pourraient plus respirer ce serait incroyable. S'il fait beau dimanche prochain, il y aura jusqu'à 6 000 personnes dans le parc. C'est un non catégorique ! »

Christian Favier (PCF) interpelle la ministre du Logement

« Si on s'aperçoit que pour des raisons diverses, il s'agissait d'une fausse bonne idée, certains secteurs seront abandonnés », a expliqué le ministère du Logement au sujet des sites à l'étude. Sans attendre, le président PCF du conseil départemental, Christian Favier, a fait savoir à la ministre du Logement Sylvia Pinel dans un courrier envoyé hier que les opérations d'aménagement « avec des proportions de 80 % de logements pour 20 % d'activités et de service ne peuvent nous satisfaire, de même que leur localisation sur des sites dont la préservation est essentielle, comme celui du parc de Choisy ».

Et d'annoncer que le département « entend participer activement aux débats » des « ateliers GrandParis du logement »

Ces élus du XVe arrondissement logés dans le parc social

Céline Carez | 09 Avril 2015, Le Parisien   Selon nos informations, neuf élus du XVe habitent dans le parc social, et le maire , Philippe Goujon (UMP), interviendrait pour appuyer certains dossiers. Ce qu'il réfute.
Quand la conseillère UMP de Philippe Goujon se rend au conseil d'arrondissement, elle n'a qu'à traverser la rue. Depuis 2012, Louise-Agathe Charpentier, déléguée à la petite enfance, habite à 100 m de la mairie, dans une HLM de la rue Péclet (XVe).
Et elle n'est pas la seule. Selon nos informations, neuf élus du XVe — des conseillers d'arrondissement, des conseillers de Paris mais aussi des adjoints du maire d'arrondissement — sont logés dans le parc social.

Logements vides de la Ville de Paris : la droite crie au scandale

Place des Vosges (IVe). L’hôtel de Fourcy, en partie propriété
de la Ville, héberge dans une aile des classes du collège
Théophile-Gautier attenant. Les espaces inoccupés, en revanche,
se dégradent lentement. 
(LP/C.H.)

L'opposition a dénombré des dizaines de constructions et de terrains nus, propriété de la commune. « Une tempête dans un verre d'eau », répond la mairie.

Des milliers de mètres carrés vides, propriété de la Ville de Paris... A l'heure où la mairie entend s'attaquer aux logements vacants dans la capitale, plusieurs immeubles, appartements ou commerces lui appartenant sont aujourd'hui inoccupés. Parfois depuis plus de dix ans ! « Un scandale », selon le conseiller (UMP) de Paris Pierre-Yves Bournazel. L'opposant municipal dénombre pas moins de trente immeubles, cinquante appartements, trente locaux, dix pavillons et une dizaine de parkings vacants. Sans oublier une vingtaine de terrains nus. Cet inventaire à la Prévert représenterait 10 000 m2 vides.

APL, HLM, rénovation thermique: un rapport propose de bousculer les aides au logement

avec l'AFP Publié le 30/01/2015
Refonte des aides personnelles au logement (APL), fin de mesures de soutien aux HLM, suppression de la prime pour travaux de rénovation énergétique: un rapport au gouvernement propose plusieurs mesures chocs pour réformer la politique du logement, ont révélé Les Echos jeudi 29 janvier.
Le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances (IGF) avaient reçu pour mission de scruter la politique du logement « à la fois extrêmement coûteuse pour les finances publiques (46 milliards d’euros en 2014, soit plus de 2% du PIB) et régulièrement dénoncée pour son manque d’efficacité (les mises en chantiers sont au plus bas) et ses effets inflationnistes », rapporte le quotidien économique, se référant à un rapport d’inspection « gardé secret depuis l’été dernier ».
C’est seulement « un document de travail », a aussitôt rétorqué la ministre du Logement Sylvia Pinel, confirmant implicitement l’existence du rapport. « Il n’exprime pas la position du gouvernement mais il vient contribuer à sa réflexion. »

Pour Manuel Valls, le HLM est « une rente de situation »

Après avoir soigné les intérêts des investisseurs privés, le Premier ministre est venu clore le Congrès des organismes HLM, qui s’est déroulé du 23 au 25 septembre. Son message pourrait se résumer à « débrouillez vous sans l’Etat ! » Et il leur a donné trois mois pour faire des propositions afin que le logement social ne devienne pas « une rente de situation » (sic). L’esprit de la loi Boutin n’est plus très loin.
Malgré un agenda international très chargé, le premier ministre a tenu à être présent pour clore le 75e Congrès du mouvement HLM, qui s’est déroulé du 23 au 25 septembre, à Lyon. Il fallait bien envoyer un signe aux 750 organismes d’habitat social, écartés du plan de relance annoncé fin août par Manuel Valls.
Le discours n’a pas de quoi rassurer. Le message adressé aux bailleurs sociaux pourrait se résumer à : « Débrouillez-vous sans l’Etat ! » En ces temps d’austérité, le premier ministre a surtout insisté sur le fait que la contribution de la collectivité pour le logement social, autour de 20 milliards d’euros, «ne faiblit pas». Alors que les chiffres de la construction de 2014 s’annoncent catastrophiques, il n’a fait qu’énoncer des mesures déjà existantes : sanction renforcée pour le non respect des 25 % de logements sociaux, mise à disposition de foncier public, taux de TVA à 5,5 % et maintien d’une exonération de 25 % de la taxe foncière pour le logement social…«L’Etat pourra-t-il faire plus ? », a lancé à la tribune, Manuel Valls. La réponse, à quelques jours de la présentation du budget, est sans équivoque : « Il sera difficile d’aller au-delà.»
Fin août, cependant, le premier ministre n’avait pas hésité à casser la tirelire pour étendre les défiscalisations offertes aux investisseurs locatifs, qui pourraient coûter autour d’1 milliard d’euros, d’après certaines estimations. Ce qui vaut pour les spéculateurs ne vaut pas pour le monde HLM. Le doublement des aides à la pierre, promesse du candidat Hollande, semble définitivement enterrée. La seule véritable concession est l’abaissement de la TVA à 5,5 % pour l’accession sociale à la propriété dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, une mesure ne favorisant pas l’accroissement du parc locatif social.
Deux jours plus tôt, la ministre du Logement Sylvia Pinel avait de son côté annoncé une enveloppe d’un milliard d’euros, sur trois ans, pour le logement social. A savoir 750 millions d’euros destinés à rénover le parc, et le surcoût de travaux liés à l’amiante, et 300 millions destinés à la création de 15 000 logements à très bas loyers. Il s’agit d’un beau coup de com’. Car l’Etat ne mettra rien de sa poche. Ces mesures seront financées par les seuls bailleurs sociaux grâce à un nouveau prêt bonifié accordé par la Caisse des dépôts et par une mutualisation de leurs fonds propres. Pour y parvenir, les organismes HLM vont mettre en commun les dépôts de garantie des locataires et les surloyers instaurés par la loi Boutin. « Les locataires vont donc payer !, s’indigne Serge Incerti-Formentini, ancien président de la Confédération nationale des locataires (CNL). On va faire payer aux moins riches du pays, ceux qui vivent en logement social,  la production de logement pour les plus pauvres.» Faire jouer la solidarité nationale pour accroître la proportion de logements sociaux, peu chers, anti-spéculatifs, et dont le rôle contracyclique est reconnu par tous, n’est plus d’actualité pour Manuel Valls. Selon lui, la production de logements sociaux « doit reposer également sur la capacité d’autofinancement des organismes ».

Des organismes HLM inaudibles

Face au désengagement de l’Etat, aujourd’hui clairement assumé, le président de l’Union sociale pour l’Habitat, Jean-Louis Dumont, également député socialiste de la Meuse, a opposé sa « prudence » et son caractère d’«homme sage». Dixit Manuel Valls. «Nous voulons démontrer que le logement social n’est pas une charge pour l’Etat», a même abondé Jean-Louis Dumont qui s’est dit « raisonnablement optimiste ». Convaincu de « relever le défi » d’atteindre, grâce à la mobilisation des seuls bailleurs, l’objectif des 150000 logements sociaux. A la tête du mouvement HLM, il n’a cessé de parler comme si il était au service du gouvernement, un simple rouage de l’appareil d’Etat.

Quand Manuel Valls parle comme Christine Boutin

L’inversion des rôles semble décidément la règle au Congrès de l’Union sociale pour l’Habitat. La ministre du logement joue la partition des organismes HLM, dont les responsables parlent comme s’ils étaient ministre du Logement ! Quant à Manuel Valls, il a repris les thématiques chères à Christine Boutin quand elle était au gouvernement.
Encourager la mobilité dans le parc social est en effet devenu la nouvelle priorité du gouvernement, au prétexte que le « taux de rotation dans le parc social est deux fois inférieur à celui constaté sur le marché locatif privé ». Le calcul est simple. Faire sortir les habitants les moins pauvres des HLM permettrait d’accroître l’offre de logement à loyer modéré pour ceux qui n’arrivent pas à se loger dans le parc privé. Un raisonnement déjà mis en œuvre par la loi Boutin, à travers l’instauration d’un surloyer pour les familles aux revenus les plus élevés. Partout où il a été appliqué, ce«supplément de loyer de solidarité » n’a fait qu’accentuer la ghettoïsation des grands quartiers populaires. Cette conception résidualiste de l’habitat social, encouragée par la commission européenne, considère qu’il doit être réservé aux plus démunis. Elle contient en germes l’idée selon laquelle le logement est une marchandise comme les autres, qui ne doit relever que du marché et du secteur privé, sauf pour ceux qui ne peuvent se l’offrir.
Hélas ! Cet argumentaire est revenu à maintes reprises dans le discours de Manuel Valls. A la fin de son discours, il a supplié les bailleurs de tout faire pour « renforcer l’accueil des plus pauvres». «C’est le cœur de votre mission », a-t-il même ajouté.
« Se maintenir dans le logement social, a-t-il déclaré, c’est un droit pour les familles à revenus modestes. Mais je veux le dire avec force : un logement social ne peut pas être une rente de situation. » Et voilà comment ce gouvernement,  après avoir asssimilé les chômeurs à des fraudeurs, présente certains locataires HLM comme des rentiers ! Pourquoi pas des profiteurs, des privilégiés, tant qu’on y est ?!  C’en est presque indécent de la part d’un premier ministre qui a refusé l’encadrement généralisé des loyers dans le privé. Parce que le faible taux de rotation dans le parc HLM trouve d’abord son origine dans l’augmentation démentielle des prix, ces quinze dernières années, dans le secteur privé.

Vers un ANI du logement ?

Mesurant le caractère explosif d’un tel sujet, Manuel Valls a évidemment pris soin de ne pas « imposer des solutions toutes prêtes ». Il a néanmoins donné trois mois aux représentants de locataires, élus, bailleurs et partenaires sociaux de réfléchir sur le sujet. Lui s’est limité à poser les questions, mais elles en disent long sur ses arrières-pensées… « Faut-il moderniser radicalement les attributions ? Faut-il augmenter le supplément de loyer de solidarité ? Faut-il avoir des loyers en fonction des ressources des locataires ? Remettre en cause le droit au maintien dans les lieux ? Inciter davantage à l’accession sociale à la propriété ? »
Le gouvernement réunira tous les acteurs du monde HLM d’ici la fin de l’année pour recevoir leurs proposition. La méthode  rappelle furieusement celle employée pour la signature de l’Accord national interprofessionnel pour la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés, signé en janvier 2013. De façon antidémocratique, le patronat et trois syndicats minoritaires, sous la pression du gouvernement, avaient imposé des reculs sociaux dans le monde du travail.
Va-t-on assister à « un ANI du Logement » ? Il faut espérer que non. Car les dirigeants de l’Union sociale pour l’Habitat n’ont pas vraiment fait la preuve, lors de leur Congrès, d’une véritable capacité à jouer le rapport de force… A l’issue de ces trois jours de débats, plus techniques que politiques, et peu démocratiques, Manuel Valls a finalement reçu des applaudissements polis. « Il y a du mouron à se faire… », se désolait Serge Incerti-Formentini, en vieux briscard de la CNL.
P. Du.
Article paru dans l’Humanité du 26 septembre 2014.
Voir le discours de Manuel Valls en intégralité ici.

L’office public de l’habitat :
 une espèce en voie de disparition ?

Après la concentration des sociétés anonymes HLM, devenues en quelques années de grands groupes mêlant activités sociales et concurrentielles, c’est au tour des offices municipaux et départementaux d’entrer dans 
la valse des fusions, acquisitions et autres restructurations. Une logique gestionnaire encouragée par la réforme territoriale.
«Fusion», «absorption», «concentration» sont devenus les maîtres mots dans le monde HLM. À l’œuvre depuis plusieurs années, les restructurations se sont accélérées en 2013, selon la très officielle Miilos, autorité de contrôle des bailleurs sociaux. «La place des organismes de moins de 1 500 logements diminue inexorablement, occupant une place de plus en plus marginale dans le logement social», se rejouit-elle dans son dernier rapport, publié cet été. Il n’y a pas que les petits organismes HLM qui se font avaler.

Ces petits canuts n’iront plus à la rue

À Lyon, six écoles sont occupées chaque nuit par des militants et des enseignants 
pour exiger de la préfecture des solutions d’hébergement pour 194 élèves sans abri.
Célébrer les droits de l’enfant, c’est bien. Se battre pour les faire appliquer, c’est mieux. Tel a été le leitmotiv des militants lyonnais du collectif ­Jamais sans toit et du ­Réseau éducation sans frontières (RESF), le 20 novembre dernier. En ce jour anniversaire des vingt-cinq ans de la Convention internationale des droits de l’enfant, ils ont occupé neuf écoles pour alerter sur l’explosion des enfants sans-abri dans l’agglomération lyonnaise.

André Yché, lieutenant-colonel
 de la privatisation des HLM

Il est à la tête du plus grand bailleur de France. Il a théorisé la vente des HLM, 
la transformation des organismes en gestionnaires de portefeuilles d’actifs immobiliers. 
Il a fait des notes blanches à M. Sarkozy. Et il est toujours en place…

Inquiétant paradoxe. Le plus éminent promoteur de la marchandisation des HLM est aussi l’homme qui dirige le plus gros bailleur social de l’Hexagone. Il s’agit en l’occurrence d’André Yché, président du directoire du groupe SNI (Société nationale immobilière), qui gère un parc de 270 000 logements.
Ce militaire de carrière a intégré la SNI, bailleur historique des armées, en 1999, après un passage au cabinet d’Alain Richard, ministre de la Défense du gouvernement Jospin. Sous sa direction, la SNI va se lancer dans une politique de concentration effrénée, agglomérant treize sociétés HLM. Le nouveau groupe va rapidement devenir l’un des acteurs les plus puissants du secteur, grâce au soutien de la Caisse des dépôts et consignations, la banque de l’État, publique, dont la SNI est une filiale à 100 %.
Une position qui n’empêche nullement André Yché de vouloir dynamiter un «modèle HLM traditionnel en voie d’épuisement»«Les vieilles recettes (…), à commencer par le recours excessif à l’argent public, ne fonctionnent plus. Il est urgent d’en expérimenter des nouvelles», écrivait-il, cet été, dans une tribune au Figaro. On doit le reconnaître : cet ancien lieutenant-colonel de l’armée de l’air mène son combat au grand jour. Il a même publié son plan de bataille dans un livre (1), en 2011, pour dissoudre le logement social dans le marché. Tout y est !

Transformer les organismes en « opérateurs immobiliers globaux »

Face à la baisse inéluctable des aides publiques et la hausse des valeurs foncières, acceptées comme allant de soi, il faut, selon lui, trouver des financements en activant«les actifs immobiliers constitutifs du parc HLM», qui représentent «du capital mort». Ce capital dormant, «définitivement exclu des circuits économiques, tout comme les biens du clergé sous l’Ancien Régime» (sic!), est la source de «plus-values latentes». C’est écrit noir sur blanc. «Ignorer le stock de plus-values latentes recelées dans le parc de plus de quatre millions de logements (de l’ordre de 200 milliards d’euros ; 100 milliards d’euros pour les seules ESH) revient à mettre à la charge de la collectivité tout le poids de l’action publique.» Il faut donc vendre.
Une cession des logements HLM aux locataires serait d’ailleurs une «opportunité»pour ces derniers «de se constituer un patrimoine». L’accession à la propriété constitue d’ailleurs, pour ce stratège, le «point clé» pour «relancer les parcours résidentiels». Selon lui, la crise du logement ne peut se régler qu’en accélérant le taux de rotation au sein du parc, et au final faire sortir ceux qui le peuvent du logement social. N’hésitant pas, au passage, à proposer une remise en cause du droit au maintien dans les lieux des habitants. Cette idée dangereuse, réservant les HLM aux plus démunis, a été récemment reprise par Manuel Valls
André Yché ne s’arrête pas en si bon chemin. Pour dynamiser le logement social, il conseille d’«instiller des mécanismes de gestion privée» dans la gestion des organismes du logement social qu’il appelle «des opérateurs immobiliers globaux». «Constructeurs, vendeurs, syndics-gestionnaires de copropriétés, […] ils doivent acquérir progressivement toutes les compétences de gestionnaires de portefeuilles d’actifs immobiliers.»

Un stratège… et un homme de réseaux

Une note blanche synthétisant ses propositions, sans signature, comme celles des RG, avait été remise à Nicolas Sarkozy, alors à l’Élysée. Mais André Yché, qui se voyait, dit-on dans les cercles des dirigeants HLM, ministre du Logement en cas de victoire de la droite en 2012, est toujours en place. L’homme sait ménager ses réseaux : il a été épinglé par la presse parce qu’il avait embauché le fils du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian… En toute tranquillité, il peut mener sa révolution au sein de la SNI, qui devrait être le bras armé de l’État en matière de logement. Il attend d’ici à la fin de l’année le blanc-seing de l’exécutif pour mettre définitivement la main sur Adoma, bailleur spécialisé dans l’insertion par le logement. Avec l’espoir d’empocher les «plus values latentes» de son parc particulièrement bien situé, souvent au cœur des villes. Fin septembre, il a fait adopter par son conseil d’administration un nouveau groupement d’intérêt économique (GIE), pour mutualiser les outils de maîtrise d’ouvrage entre des entités assurant des missions sociales (Efidis, Osica…) et d’autres en charge d’activités dans le secteur libre. Un mélange des genres épinglé par le dernier rapport de la MIILOS.
Aujourd’hui, ce gestionnaire d’organismes du logement social a d’autres priorités que le logement social : développer le logement intermédiaire. Après de nombreuses réunions avec Emmanuel Macron, à l’Élysée, il a obtenu de l’État des moyens financiers pour développer 25 000 logements en secteur libre, avec des prix entre le logement social et les prix du marché. Et qui permet aux investisseurs privés d’obtenir une rentabilité de 5 % sur leurs investissements…
Pierre Duquesne
1. « Logement, habitat et cohésion sociale, au-delà de la crise, quelle société voulons-nous pour demain ? » Éditions Mollat, 2011.

Article paru dans le Supplément Logement de l’Humanité Dimanche n°437 du 13 au 19 novembre 2014.

"Voyez avec votre assistante sociale..." : j'ai 60 ans et je vais être expulsée de mon HLM

Chaque année, il y a près de 110.000 dossiers de demande
d'expulsion à l'encontre de locataires. (AFP PHOTO/M. BUREAU)

Chaque année, on compte près de 110.000 demandes d’expulsions. La plupart n’aboutissent pas, mais dans 10% des cas le locataire est prié de quitter son hébergement, parfois avec le recours de la force publique. Esther Eva H., 60 ans, habite Clichy-la-Garenne, dans les Hauts-de-Seine. Elle a jusqu’au 2 août pour partir.

Témoignage. Par Ex-bibliothécaire

Édité par Louise Auvitu, Nouvel Obs, le 11-07-14
  
J'ai appelé au secours, envoyé des courriers, donné une tonne d'explications. Je me suis adressée à la mairie, à tous les organismes possibles et inimaginables, demandant, suppliant, quémandant.

Puis, j'ai montré les crocs, porté plainte, me défendant, me querellant. Et enfin, j’ai espéré être entendue grâce aux réseaux sociaux.


Ile-de-France : La construction de 5 000 logements stoppée depuis 3 mois

Pour Jean-Paul Huchon, il faudrait 70.000 logements par an pour réduire la pénurie.
Le président PS d'Ile-de-France Jean-Paul Huchon est inquiet. Des projets immobiliers représentant environ 5.000 logements dans la région seraient "ajournés" depuis les municipales et des changements de majorité.

Un sans-domicile sur 3 a un emploi

Dans l’agglomération parisienne, 31 % des sans-domicile ont un emploi, 36 % sont au chômage et le tiers restant est inactif. En province, seulement un sans-domicile sur cinq travaille.

Ils occupent des emplois peu qualifiés et ont des conditions de travail précaires. La moitié des sans-domicile de l’agglomération parisienne travaille à temps partiel et deux cinquièmes d'entre eux souhaitent travailler plus. Les femmes et les étrangers sont davantage concernés par ces situations. Trois sans-domicile au chômage sur cinq le sont depuis plus de deux ans et un quart n’a aucun revenu. Leurs démarches pour trouver un emploi ne leur permettent pas de décrocher un entretien d’embauche.

Yché s'inquiète du manque de logements sociaux…

on a la solution : virer Yché et cie !
FIGAROVOX/TRIBUNE - André Yché, responsable de la filiale immobilière de la Caisse des dépôts appelle à repenser le mode de financement des HLM pour résoudre l'urgence de la crise du logement.

Alerte rouge sur la production de logements

De nombreux projets de construction de logements, tant publics que privés, sont bloqués par les nouvelles équipes municipales. L'Union sociale pour l'habitat réclame des mesures fortes, le ministère du Logement reste quant à lui plus timoré.
La Gazette le 11/06/2014 • Par Delphine Gerbeau •
La baisse de 2,6% des logements autorisés et de 3,4% des logements commencés entre janvier et avril 2014 inquiète de façon croissante les professionnels de l’immobilier public et privé.

Squats à Calais


évacuations prévues le 30 mai 


Nous sommes un ensemble de personnes venues de différents pays et d’horizons politiques divers qui luttons pour le droit au logement pour toutes et tous, quelles que soit leurs origines. 
Nous occupons depuis fin février, trois bâtiments publics vides, abandonnés par l’OPH de Calais, rue de Vic, rue Aubert, et rue Masséna.

Pour respirer

un peu d'air frais 
à lire sur Rue 89

Ma yourte en Mayenne : 36 000 euros et la bénédiction du maire




Faut-il vendre les logements sociaux ?

Si les bailleurs sociaux se mettait à vendre massivement les logements rentabilisés de leur parc, ils pourraient en construire de nouveaux... mais pas forcément pour les plus pauvres.  /  Mathias Thépot
D'aucuns s'accordent à dire qu'il est nécessaire d'accroître l'offre de logements sociaux, notamment pour faire face aux dérives des prix dans le secteur privé et permettre l'accès à un logement décent au plus grand nombre. 

Logement social : les affaires parallèles du directeur général de la SNI

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L’un des principaux dirigeants de la Société nationale immobilière (SNI), le premier bailleur social français, a une double vie professionnelle: il consacre discrètement une bonne partie de son énergie à superviser les activités de plusieurs sociétés qui lui appartiennent et qui contrôlent un luxueux et lucratif village naturiste.  PAR LAURENT MAUDUIT  Mediapart  3 MARS 2014

On ne sait pas bien s’il faut en rire ou en pleurer ! L’un des principaux dirigeants de la Société nationale immobilière (SNI), la filiale de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), le premier bailleur social français, a une double vie professionnelle. La première est publique : directeur général de la société d’économie mixte, Yves Chazelle (ici sa biographie) utilise officiellement tout son temps à développer cette filiale de la CDC qui a des missions d’intérêt général de première importance. Et le même Yves Chazelle, qui était à l’origine un promoteur privé, consacre plus discrètement une bonne partie de son énergie à superviser les activités de très nombreuses sociétés qui contrôlent un grand et luxueux village naturiste, ce qui a grandement contribué à faire sa fortune.

Commission européenne et logement social

Depuis une dizaine d'années, les conflits se sont multipliés sur l'application des règles de la concurrence en matière de logement social entre Bruxelles et les organismes HLM. A l'heure où son mandat s'achève, le commissaire à la Concurrence semble revenir à une conception moins libérale du sujet. Marie Herbet / Contexte / 7 mai 2014
Connu pour ses passes d'armes avec Arnaud Montebourg sur les aides d'Etat, le commissaire européen à la Concurrence délivre, à quelques mois de la fin de son mandat, un message susceptible d'apaiser les esprits. "Il existe une confusion que je voudrais éclaircir, écrit Joaquin Almunia dans une lettre que nous avons consultée, adressée fin avril à la maire de Paris, Anne Hidalgo. La Commission ne prétend pas du tout imposer une définition du logement social." 

L'affirmation vient ponctuer une bataille qui oppose depuis une dizaine d'années les instances européennes au secteur du logement social. Ce dernier doit-il se cantonner à la frange la plus pauvre de la population ? Ou doit-il rester accessible à une palette plus large de personnes pour favoriser la mixité sociale dans les immeubles ?
Les Pays-Bas, puis la Suède, la France…
Tout est parti des Pays-Bas, lorsque la Commission, appuyée dans sa démarche par le secteur privé de l'immobilier, a commencé, dès 2005, à exprimer des doutes sur le régime néerlandais très large de logement social. 
Un enjeu qui s'est depuis répandu comme une traînée de poudre, remettant en cause le service public du logement en Suède et aiguisant la méfiance des organismes de HLM d'autres pays, dont la France, sur l'ampleur du droit de regard de l'UE sur ces services publics.

Dans sa réponse de fin avril, le commissaire Almunia dit partager "la conviction" visant à garantir une "qualité de vie décente" aux citoyens. Si le secteur du logement social y voit une inflexion positive, la vigilance reste de mise. 
Récemment, l'Union sociale pour l'habitat, en France, a alerté par écrit trois ministres (Sylvia Pinel au Logement, Harlem Désir aux Affaires européennes et Najat Vallaud-Belkacem à la Ville), les invitant à se mobiliser sur le dossier.
Désaccord persistant
Historiquement, les Pays-Bas ont opté pour une conception jugée trop large du logement social, dont l'accès n'était réglementé par aucun plafond de ressources, alimentant ainsi les critiques du secteur privé qui s'estime victime de concurrence déloyale. Le gouvernement néerlandais se résout finalement à adopter une limite : depuis janvier 2011, seuls les foyers disposant de revenus inférieurs à 33.000 euros annuels pourront y prétendre. 
Problème, les négociations, tenues dans un climat conflictuel avec la commissaire à la concurrence de l'époque, la libérale Neelie Kroes, ont laissé des traces. La révision opérée reste contestée par les organismes de logements sociaux néerlandais, car le seuil de ressources retenu serait inadéquat : 
il ne fait pas cas du nombre de personnes composant le ménage et seuls 10% du parc de logements aidés peuvent être attribués à des foyers dérogeant au plafond de 33.000 euros.
L'arrêt final est attendu cet automne
L'affaire est toujours pendante. Ce mois-ci, des auditions auront lieu à la Cour de justice de l'UE de Luxembourg, à la suite d'un recours formé par les organismes néerlandais, appuyés par l'Union sociale pour l'habitat et la fédération européenne Cecodhas. L'arrêt final, attendu cet automne, scellera le sort du régime négocié en 2009 avec la Commission, pour qui le périmètre du service public (dit service d'intérêt économique général) doit se restreindre aux plus défavorisés. Il conviendrait donc au privé d'assurer l'offre de logements pour le reste des locataires. 

Preuve supplémentaire du désaccord persistant avec Bruxelles, le Parlement néerlandais a "relevé le plafond à 36.000 euros sans prévenir la Commission", indique un proche du dossier.
L'enjeu de la mixité sociale
Ce climat a aussi accru la mobilisation des élus locaux. En mai 2013, les maires de 18 villes, dont Paris, Nantes, Berlin, Milan, Vienne ou encore Amsterdam, avaient adopté une résolution dans des termes fermes : "Nous désapprouvons l'approche visant à se concentrer uniquement sur les groupes à faibles revenus, car cela aboutirait à de la ségrégation sociale." 
Fin 2013, l'ex-maire de Paris Bertrand Delanoë avait renchéri en adressant une lettre au commissaire au Marché intérieur et aux Services Michel Barnier, suivie, un mois plus tard, d'une missive adressée par l'édile de Vienne, Michael Häupl. 

Dans cette bataille pour le respect de la "subsidiarité", les "choix exprimés par les élus locaux ont eu plus de poids que la voix des Etats", estime-t-on à l'Union sociale pour l'habitat.

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« La Commission Européenne a une vision restrictive du logement social »

Publié le 14/05/2014 • Par Catherine Le Gall 
Laurent Ghékière, directeur des affaires européennes de l’Union sociale pour l’Habitat, revient, dans une interview à La Gazette des communes, sur le bilan des enjeux liés au logement social, suivis par le Parlement européen.

Quel bilan tirez-vous de la précédente mandature ?

Le premier élément positif est que les organismes de logement social peuvent accéder aux Fonds Européen de Développement Régional (FEDER). Ce résultat est l’aboutissement d’une campagne de deux ans pour faire reconnaître la spécificité du logement social. De plus, le plafond qui limitait ces financements à 4% de l’enveloppe totale a été supprimé. 600 projets de rénovation thermique ont déjà été financés par ce biais à ce jour. Nous devons aujourd’hui nous assurer que cette mesure va être reconduite au niveau régional.

Quels sont les enjeux à venir devant le Parlement européen ?

Il y en a plusieurs. Concernant la TVA, tout d’abord : le logement social bénéficie d’une TVA réduite au titre de « bien de première nécessité ». Il est aujourd’hui question d’appliquer un taux « normal minoré » à notre secteur et nous devons travailler avec le Parlement européen pour conserver l’acquis de la directive TVA actuelle. Deuxièmement, la « directive services » va être revue et cela pourrait remettre en question les agrément spécifiques, délivrés par l’Etat, aux organismes de logement social sous prétexte qu’une telle disposition est une entrave au marché intérieur. Là encore, nous devons nous positionner dans les débats à venir.

Quelles sont les nouvelles tendances auxquelles le logement social doit s’adapter au niveau européen ?

Nous sommes actuellement face à un nouveau phénomène lié au contrôle, par la Commission Européenne, des données macro-économiques qui président aux budgets des Etats membres. Celui-ci conduit à des recommandations ayant des répercussions sur le logement social. Ainsi, la Commission Européenne a demandé aux Pays-Bas et à la Suède de supprimer les contrôles exercés sur les loyers au motif qu’ils étaient trop exigeants et qu’ils pesaient sur la régulation du parc privé. Cette décision est prise sans que le Parlement ait été consulté au préalable alors que les conséquences sont importantes. Nous aimerions que le Parlement soit co-décisionnaire puisque cela peut avoir un impact sur le pouvoir d’achat des ménages.

La justice européenne doit se prononcer à l’automne sur le contentieux qui oppose les Pays Bas à la Commission européenne. Que peut-on attendre d’un tel jugement ?

La Commission Européenne a une vision restrictive du logement social : elle estime que c’est un service public qui s’adresse exclusivement aux populations les plus défavorisées. Or, les Pays-Bas ont une conception plus large du champ d’intervention du logement social dans le marché du logement. L’USH et la fédération européenne ont soutenu les Pays-Bas devant la Cour de Justice et nous attendons que le calendrier des audiences soit fixé. Sa décision est importante car, si elle est en notre faveur, alors la définition des services publics à caractère social reviendra explicitement aux Etats membres et non plus à la Commission.