Immobilier : ce qui va rester de la loi Duflot

Par Myriam Chauvot | 13/01 | 06:00
    Immobilier : ce qui va rester de la loi Duflot

    L'examen du projet de loi Alur démarre demain en seconde lecture.
    Certains sujets ont été déminés, d'autres tournent à la guerre de tranchée.

    Les députés vont de nouveau s'affronter sur les mesures phares du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur). Après un premier travail d'amendement en commission en décembre, ce texte fleuve entamera demain sa seconde lecture. Vendredi soir, date limite de dépôts des amendements, on en dénombrait pas moins de 720… Certains sujets ont été déminés, mais d'autres tournent à la guerre de tranchée. Revue de détail des points durs.

    garantie universelle des loyers (GUL)

    Elle était trop polémique et son coût était flou : elle a été désamorcée. Exit la cotisation des bailleurs et des locataires, le coût (450 millions d'euros selon les estimations ministérielles) sera à la charge de l'Etat. Exit, surtout, le caractère obligatoire, le bailleur pourra recourir plutôt à une caution. Or les cautions représentent 80 % du marché locatif, contre 15 % pour l'assurance privée (la « GLI ») et 5 % pour l'assurance publique des publics précaires (la « GRL »).
    «  La GUL, ce sera l'universalité pour moins de 20 % du marché locatif, résume le député UDI Michel Piron. Mais ça reste plus large que la GRL, c'est donc un progrès pour la protection des publics particuliers. » Le corapporteur d'Alur, le député PS Daniel Goldberg, se veut plus optimiste encore : «  La GUL ne sera pas marginale, les bailleurs la préféreront au système de la caution car elle sera plus efficace, avec notamment le concours du Trésor public pour le recouvrement des impayés. » En l'état actuel du texte, la GUL couvrira pendant dix-huit mois les impayés de loyers à hauteur de la médiane des loyers pratiqués dans la zone concernée. Au-dessus, libre au bailleur de faire appel à une assurance privée complémentaire. La GUL sera applicable en 2016, son agence nationale créée dès 2014. Mais il reste beaucoup d'inconnues sur son fonctionnement pratique. «  I l faudrait une expérimentation sur six à dix départements avant toute généralisation », s'inquiète Michel Piron, qui a déposé un amendement en ce sens. Reste les reproches de fond. «  On a transformé un système d'assurance des locataires les plus précaires gratuit pour l'Etat [la GRL est financée par les partenaires sociaux] en un système à la charge de l'Etat, avec un coût chiffré au doigt mouillé », dénonce Benoist Apparu, député UMP et ex-ministre du Logement, qui a instauré en son temps la GRL. « De plus, en zone tendue la GUL n'atteindra même pas son objectif d'aider les publics précaires : la GRL a montré que ça ne marchait pas car quand le bailleur a le choix entre dix candidats, il choisit le profil le plus sécurisant. »

    encadrement des loyers

    Des médianes de loyers (en euros au mètre carré) vont être fixées par des observatoires locaux (en cours de constitution) pour encadrer les loyers. Ceux-ci pourront être ajustés à la baisse s'ils sont supérieurs de plus de 20 % et à la hausse s'ils sont inférieurs de plus de 30 %, avec possibilité de recours au juge en cas de désaccord. Plusieurs polémiques animent le débat : l'une de fond sur le risque de faire fuir les investisseurs, et donc de réduire l'offre de logements locatifs ; l'autre sur la faisabilité technique de recueillir les données (celles sur l'âge et l'état, insalubre ou rénové, des logements n'existent pas) et de calculer des médianes pertinentes. Un troisième point fait débat : les effets du mécanisme. Pour ses détracteurs, comme l'économiste Michel Mouillart, il fera baisser les loyers des plus riches et monter ceux des plus modestes. Pour le rapporteur Daniel Goldberg, les garde-fous nécessaires ont été mis en place. Impossible de trancher car aucune expérimentation sur une zone pilote n'a été faite. «  Nous pensons que la situation est tellement grave qu'il faut agir vite », justifie Daniel Goldberg.

    plan local d'urbanisme intercommunal

    En zones tendues, construire étant impopulaire, nombre de maires freinent des quatre fers tandis que dans des zones sans besoins ils construisent à outrance. Le tout sans cohérence d'aménagement entre communes. Rendu initialement obligatoire par le projet Alur, le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) enlève aux maires le pouvoir de définir les zones constructibles. La mesure a suscité un tollé chez les maires et au Sénat, qui l'a neutralisé en prévoyant que 25 % des élus locaux représentant 10 % de la population intercommunale pourront s'y opposer. La commission de l'Assemblée a contre-attaqué en durcissant la règle du vote de veto (deux tiers des élus locaux et 50 % de la population ou l'inverse). Si les députés votent cet amendement, ce sera la guerre de tranchées avec le Sénat et l'acceptation d'un risque politique à l'approche des municipales.

    calendrier strict

    Le vote des députés doit s'achever le 26 janvier, puis «  la commission du Sénat se saisira du texte la semaine prochaine, pour un passage dans l'hémicycle fin janvier, précise Daniel Goldberg. Cela permet d'espérer une commission mixte paritaire le 15 ou le 25 février et l'adoption définitive du texte avant les élections municipales ».

    Myriam Chauvot

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