Alerte rouge sur la production de logements

De nombreux projets de construction de logements, tant publics que privés, sont bloqués par les nouvelles équipes municipales. L'Union sociale pour l'habitat réclame des mesures fortes, le ministère du Logement reste quant à lui plus timoré.
La Gazette le 11/06/2014 • Par Delphine Gerbeau •
La baisse de 2,6% des logements autorisés et de 3,4% des logements commencés entre janvier et avril 2014 inquiète de façon croissante les professionnels de l’immobilier public et privé.
Si l’on compare ces chiffres à ceux de l’année précédente, la situation apparaît encore plus préoccupante : sur les 12 derniers mois, le nombre de logements autorisés a baissé de 21,5%, et le nombre de logements commencés de 6,5%, ce qui signifie que les mois à venir s’annoncent encore plus moroses.
L’objectif de construction de 500 000 logements d’ici 2017 apparaît de plus en plus inatteignable, malgré l’intense travail du ministère du Logement depuis deux ans, et sa loi de mobilisation du foncier public, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, et plusieurs ordonnances visant à accélérer les projets de construction.
Davantage de changements d’équipes - Les élections municipales et les nombreux changements d’équipes sont probablement l’une des explications. Mais par comparaison avec les précédentes élections municipales, le climat est beaucoup plus tendu, explique-t-on à l’Union sociale pour l’habitat (USH). « Il y a eu plus de changements d’équipes que lors de la précédente élection municipale ; on est aussi dans une période de repli, et de plus forte sensibilité par rapport au logement social dans l’opinion », indique Marianne Louis, chargée de mission à l’USH.
La Fédération de la promotion immobilière avait déjà alerté le 15 mai dernier : « pour sortir un permis de construire, il faut en moyenne neuf mois, alors que François Hollande a annoncé il y a quelques semaines un délai de cinq mois : cela nécessite de revoir les procédures d’instruction, dans le sens d’une démarche qualité, afin que tous les services concernés envoient en même temps les demandes de pièces manquantes, réclamait son président François Payelle. Les collectivités qui fixent les règles de construction via les PLU, ou imposent des prix maitrisés, contribuent encore à complexifier la situation. »
Les bailleurs sociaux commencent également à s’inquiéter : les chiffres de début d’année annoncent un fléchissement de la production de logements sociaux, alors que 2013 s’était clos sur une hausse de 13% de la production de logements. L’AORIF – l’Union sociale pour l’habitat d’Ile-de-France a lancé une enquête auprès des directeurs d’organismes d’Ile-de-France sur l’état d’avancement des projets programmés : ceux -ci disent être inquiets sur environ 8000 logements, pour le moment en suspend. Dans 28% des cas, le projet est stoppé en raison d’un recours contentieux de tiers, dans 27% des cas, il est en attente du fait du changement de maire, dans 15% des cas, les projets montés en vente en l’état futur d’achèvement avec des promoteurs immobiliers sont bloqués du fait de problèmes de commercialisation de la partie logements privés. L’USH a sollicité l’ensemble des bailleurs sociaux sur le territoire afin de faire une étude plus exhaustive.

Plan de bataille – Elle propose par ailleurs un « plan de bataille » pour débloquer les projets, avec une réunion mensuelle des préfets avec les présidents des offices et entreprises sociales pour l’habitat, et un pointage dossier par dossier des difficultés à résoudre, le tout suivi au niveau du cabinet de la ministre.
Pour le moment, Sylvia Pinel a réagi en envoyant le 23 mai dernier une circulaire aux préfets, leur enjoignant « d’attirer l’attention des élus locaux sur l’efficacité d’un effort partagé en faveur de la construction de logements ». Ils sont aussi encouragés à engager des négociations globales pour « éviter les blocages d’une discussion terrain par terrain ». Les préfets doivent aussi faire la promotion des mesures de simplification récentes, comme la procédure intégrée pour le logement, sensée diviser par deux les délais de réalisation des projets, ou encore de favoriser « une interprétation des règles susceptibles d’accélérer les dossiers »…

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