Floréal, la cité HLM où les loyers baissent


dans Le Monde, 4 février 2013

152 locataires HLM qui voient leur loyer baisser. Une ville qui rachète
des logements pour les reconventionner en logements sociaux. 
Et la société Icade à nouveau pointée du doigt. Ce sont pratiquement quatre ans de bagarre des locataires de la cité Floréal contre la vente à la découpe de leurs logements HLM qui viennent de
s’achever à Saint-Denis.

> Le 19 janvier, les habitants de cette grosse cité, au cœur d’un quartier très modeste,
en bordure du parc de la Courneuve, avaient le sourire pour fêter la convention
quadripartite tout juste signée entre la ville, la préfecture, Plaine Commune et Plaine
Commune habitat, le nouveau bailleur social. C’est en effet le retour dans le parc HLM
que les partenaires ont acté. Et la promesse d’une gestion plus sociale.

 « Une baisse de 79 euros, c’est pas rien »
> Les loyers vont en effet baisser de manière significative pour ces locataires qui
avaient vu leur appartement privatisé en 2001 par Icade, filiale de la Caisse des dépôts
et consignation. Icade avait fait passer les appartements dont elle avait la gestion en
logements à loyer libre par lots de 200 et le prix au mètre carré avait monté jusqu’à 12
euros pour tous les locataires qui emménageaient. Les baisses sont substantielles pour
ces foyers aux salaires peu élevés passant à 7,92 euros le mètre carré.
> Pour un F3 de 60 m2, l’addition, qui atteignait entre 553 et 720 euros par mois, ne
sera plus que de 475 euros. « C’est vraiment un plus », souffle Amel Belaïfa, jeune mère
de famille au chômage. Arrivée avec son mari en 2007, elle avait trouvé son trois-pièces
par internet. A l’époque elle était salariée tout comme son mari. Depuis, elle a perdu
son magasin et son emploi. Alors quand elle a appris que sa cité retournait dans le giron
des HLM gérée par l’office intercommunal Plaine commune habitat, elle était « super
contente » : « une baisse de 79 euros, c’est pas rien », glisse-t-elle. Comme beaucoup de
résidents de Floréal, la famille Belaïfa a des revenus modestes et toute économie est
bienvenue quand le chômage frappe.

> Mauvaise réputation
> La cité construite en 1964 a bonne tenue avec ses bâtiments rénovés, ses appartements
confortables. Mais elle a souffert du départ de ses petits fonctionnaires qui avaient
emménagé les premiers, vite remplacés par de plus pauvres. Excentrée, avec son centre
commercial en berne et ses petits trafics en bas des tours, elle n’a pas bonne
réputation, reconnaît le responsable local de la Confédération nationale du logement,
Bruno Lambert. « Nous sommes pourtant nombreux à aimer ce quartier qui est en train
d’être rénové et à bien y vivre », assure-t-il.
> Les logements comptent beaucoup de petits retraités qui ont eu peur de se voir délogés
quand leur bail social demeurait leur élément de sécurité. Alors quand Icade a annoncé
qu’il allait vendre les logements, la CNL a mobilisé les habitants, alerté les élus : il
fallait que la ville rachète la cité. Ce fut chose faite en octobre 2010. De longs mois
seront encore nécessaires pour que l’office HLM obtienne de pouvoir remonter les plafonds
de ressources pour ces logements réhabilités : « notre idée est de faire venir une
population aux revenus plus élevés et de parvenir à plus de mixité tout en maintenant des
loyers bas pour tout le monde », explique-t-on chez le bailleur.

> "Le plus grand scandale immobilier"
> Reste le fond du dossier de cette vente Icade. « On a fait ce qu’il y avait de mieux
pour sécuriser les locataires. Mais on a une grande frustration de voir que rien n’a
bougé pour la filiale de la Caisse des dépôts et consignations qui, avec cette vente à la
découpe, est quand même responsable du plus grand scandale immobilier en Ile-de-France »,
souligne Stéphane Peu président de l’office HLM de Plaine commune habitat.
> Introduite en bourse par la Caisse des dépôts en 2008, la société avait en effet vendu
son patrimoine de quelque 34 000 logements franciliens pour investir dans l’immobilier de
bureaux, réalisant au passage une plus value de deux milliards d’euros. La cession fut
dénoncée par plusieurs élus franciliens qui s’insurgeaient contre « cette braderie faite
en sous-évaluant un patrimoine construit avec les deniers publics », explique M. Peu. Les
élus sont maintenant en attente des résultats de l’inspection de la Cour des comptes sur
cette vente de logements qui fit tant de bruit.
Sylvia Zappi