Le COPAF critique la timidité des réformes dans la loi ALUR concernant la vie des résidents des logement-foyers et des résidences sociales

Lors de trois colloques successifs et à travers de nombreuses lettres, pétitions et rendez-vous, le Copaf - collectif pour l'avenir des foyers, une association de soutien aux délégués et aux comités de résidents dans les foyers et les résidences sociales, a proposé une série de réformes destinées à renforcer les droits et à améliorer les conditions de vie des résidents de cette forme de logement.

Le cabinet de Mme Duflot a pris en compte de manière limitée deux de nos demandes et a ignoré trois autres.

1) Droit à la vie privée
L'amendement commence très bien, il prévoit qu'aucunes autres restrictions que celles prévues par la loi ne peuvent limiter la jouissance de la vie privée dans sa chambre ou son studio par le résident. Et puis suivent plusieurs alinéas qui disent que, malgré cela, le gestionnaire garde un double des clefs des parties privatives et peut entrer sans autorisation préalable, une restriction majeure par rapport au droit commun. Aucun élément, aucune dérogation au droit commun ne justifient que le gestionnaire ait un passe lui permettant d’ouvrir tous les logements. La sécurité et la responsabilité pénale du gestionnaire ne sont que des prétextes. La loi prévoit d’ores et déjà tous les différents cas d’entrée en force dans un logement, par exemple par les pompiers en cas d’incendie, ou les urgentistes en cas de grave danger pour les personnes.
Aucun locataire n'est obligé de céder une copie de sa clef à son bailleur ou propriétaire, sous prétexte de sécurité.
Malgré les limitations prévues dans la rédaction, nous savons que dans la pratique, dès que le gestionnaire a la clef, lui et son personnel s'en servent. En fait, il s'agit simplement de céder aux gestionnaires un droit de regard sur l'espace privé de leurs locataires qui n'existe pas dans le droit commun et qui est inadmissible et scandaleux. Sous prétexte que les résidents sont des immigrés ou des précaires, on les place dans un régime de droit à part. Cette discrimination était la règle il y a quarante ans de l'époque de la grève des loyers dans les foyers Sonacotra. Il est temps d’y remédier. Nous demandons la suppression du dernier alinéa de l’article 22 bis AA.

2) Reconnaissance du comité de résidents
La reconnaissance dans la loi d'un "comité de résidents" et la référence à un décret plutôt qu’au règlement intérieur ou au conseil de concertation pour fixer les modalités de son élection sont des avancées.
Car jusqu’à aujourd’hui la « consultation » des délégués des résidents sur la révision des règlements intérieurs, les travaux, la gestion des espaces communs… s’est avérée n’être qu’une simple exercice  d'information. En effet, les gestionnaires n’ont aucune obligation à prendre en compte les désaccords des représentants des résidents, ils imposent en conséquence leurs décisions et leur règlement intérieur quels que soient les désaccords ou les observations des délégués des résidents. Il n’y a eu aucune consultation sur les nouvelles rédactions des règlements intérieurs issues du décret de 2007. Et il n’y a pour l’instant aucune raison pour que cela change. En outre, les règlements intérieurs ne sont pas rédigés en fonction du lieu, des espaces communs existant, du nombre de travailleurs âgés … Ce sont les mêmes règlements intérieurs uniformes sur l’ensemble du territoire établis par la direction centrale de chaque gestionnaire. Il est donc vain de penser que règlement intérieur et droit commun font bon ménage.

Enfin, il serait plus opportun que les modalités de mise à disposition de locaux et de moyens pour le comité de résidents soient également déterminées par décret (avec des minimums de temps de disponibilité des locaux et de moyens).
Sur les trois amendements proposés par le Copaf et ignorés dans la loi ALUR :

3) Pour permettre aux résidents des logements-foyers de bénéficier de la même protection que les locataires en cas de surendettement, retard de loyer ou menace d'expulsion, nous avons proposé l'amendement suivant :
« Il est ajouté à la fin de l'article L 633-1 du Code de la construction et de l'habitation le paragraphe suivant :  « Les dispositions des articles  L 353-15-1,  L 353-15-2   et  L 442-6  du Code de la construction et de l'habitation sont applicables aux logement-foyers. »
Lors de nos discussions avec le cabinet de Mme Duflot dont la dernière date du 6 janvier, nous avons compris que le gouvernement n'avait pas d'objection à cette application du droit commun. Or pour des raisons que nous ignorons, cet amendement n'a pas été porté au vote des parlementaires. Nous sommes déçus de cette absence de volonté d'appliquer une égalité de traitement à tous les citoyens et nous continuerons de faire campagne pour cette mesure.
4) Pour donner une impulsion aux réhabilitations des foyers qui sont complètement hors normes ou très dégradés, nous avons proposé de pouvoir faire appliquer la loi sur le logement indécent et indigne.
« Il est ajouté à la fin de l'article L 633-1 du Code de la construction et de l'habitation le paragraphe suivant :
« Les  dispositions des articles 6 20-1  et  24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 sont applicables aux logement-foyers dans un délai de 5 ans à partir de la date de promulgation de la présente loi.
Le cabinet de Mme Duflot prétend qu'un tel amendement serait inapplicable et rendrait illégal une bonne partie du parc des logement-foyers. Il nous semble que cette rédaction permet un délai suffisamment long d’autant qu’ensuite le Juge apprécie les délais complémentaires qui pourraient être nécessaires. La loi de 89 n’a pas mis fin à l’indécence des logements du secteur privé, mais elle a permis aux citoyens et à l'Etat d'exercer une pression pour mettre fin rapidement aux situations les plus scandaleuses.

5) Nous avons voulu rendre obligatoire avec une surface au prorata du nombre des résidents les espaces collectifs intégrés dans chaque logement-foyer.
L’article L 633-1 du Code de la construction et de l’habitation est complété par le second paragraphe suivant :
« Un décret en Conseil d’Etat fixe le nombre et la superficie minimum des locaux communs en fonction du nombre de résidents dans un logement-foyer. Ils sont constitués au minimum, d’un local pour le comité de résidents, d’un espace-cuisine et d’une salle polyvalente. »
Le cabinet de Mme Duflot argumente son refus de légiférer sur ce point en proposant d’intégrer cette question essentielle dans un décret et dans la future circulaire concernant les réhabilitations de FTM et de FJT dite de programmation et d’orientation. Il reprend l'argument des gestionnaires sur le prix du foncier et la diversité des populations logées qui militeraient contre l'imposition de contraintes à ce propos. Or la question du prix du foncier, même si elle est bien réelle, n’explique pas à elle seule les décisions qui ont prévalu à Grand-Quevilly ou à Saint-Ouen-L’Aumône (opérations de démolition-reconstruction d’un FTM en résidence sociale sans aucun espace collectif) ou encore à Paris (où sont programmés un grand nombre de logements T1’chers et coûteux en superficie).  De même la question des moyens financiers, également réelle, ne peut justifier que des travailleurs vivent dans des logements-taudis ou très dégradés, sans entretien et sans confort.
Il nous semble donc indispensable qu’à minimum il y ait possibilité de pression sur les gestionnaires, propriétaires et pouvoirs publics quant à l’obligation que soient aménagés des espaces collectifs en superficie et en nombre suffisants et cela, dès les comités de pilotages de planification de la réhabilitation des logement-foyers.

Nous allons continuer à nous mobiliser avec les résidents des logement-foyers et des résidences sociales pour assurer une bonne application de ces nouveaux dispositifs, et pour gagner la bataille de l'égalité des droits entre résidents des foyers et locataires ordinaires, bataille vieille de quarante ans et qui n'est pas encore finie.

Le 21/01/2014

Copaf


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